L’économie au coeur de nos bourgs & de nos villes
L’économie au coeur de nos bourgs & de nos villes

L’économie au coeur de nos bourgs & de nos villes

  Introduction

Il y a quelques jours j’étais convié à Saint Renan à une réunion organisée par la CPME (Confédération des Petites et Moyennes Entreprises) sur les difficultés rencontrées par nos commerces de centre bourg.

Cette réunion réunissait plusieurs entrepreneurs (dont moi) mais également des élus de la CCPI parmi lesquels des maires et le président de la communauté de communes. Il n’y avait hélas aucun élu de la commune de Plougonvelin alors que la redynamisation du cœur de bourg est un sujet pour le moins brûlant.

cpme

Un effondrement économique général des centre bourgs

économie PlougonvelinIl ne faut pas se payer de mots et appeler un chat un chat, depuis quelques années la lente dégradation des centre-bourgs s’est accélérée et c’est à un véritable effondrement que nous assistons actuellement. Ce phénomène n’est pas propre à notre commune, il est général et touche les petites comme les grosses municipalités.

Bien sûr en fonction des zones géographiques, le phénomène est plus ou moins fort, plus ou moins rapide.

Mais pourquoi cet effondrement ?

Il y a d’abord des causes très anciennes datant de plusieurs dizaines d’années.

Après 1945, des phénomènes sociétaux comme la montée en puissance de l’activité professionnelle des femmes, la modification des possibilités de mobilité avec la généralisation de la voiture familiale ou encore l’arrivée de nouveaux modèles économiques de commerces comme les super puis hypermarchés, ont progressivement fragilisé le petit commerce de proximité.

Les horaires d’ouverture ne correspondaient plus aussi bien aux habitudes de consommation, la question du stationnement favorisait les grandes surfaces au détriment du commerce de centre ville, l’efficacité économique et logistique des supermarchés était redoutable pour le petit commerce de détail.

Et ce ne sont que quelques éléments qui ont lentement mais surement fragilisé le petit commerce de nos communes.

Le mouvement s’est soudainement accéléré à partir de 2008 avec le triomphe du commerce numérique. Un modèle d’affaires comme celui d’Amazon offre un avantage concurrentiel irrésistible sur la visibilité et la zone de chalandise (on peut cibler toute la planète là où nos commerçants ne visent au mieux que la zone communale). Ce modèle est également redoutable en matière de logistique : il est possible de commander en ligne n’importe quel modèle d’un produit standard, c’est à dire n’importe quelle couleur ou taille de chaussure par exemple. Cette fois, l’offre locale, même celle des supermarchés, n’est pas en mesure de répondre du tout !

Finalement les seuls commerces qui résistent encore sont les services non « dématérialisables » (difficile de se faire couper les cheveux en ligne) et les professions réglementées (pharmaciens, médecins, …). Les services publics (comme La Poste) pourraient être conservés mais les municipalités n’en n’ont pas toujours la volonté.

Qu’en est-il du cœur de bourg de Plougonvelin ?

En l’état, le volet économique du projet cœur de bourg est promis à l’échec.

Le pôle médical aurait pu servir de locomotive économique, mais, comme celui de Ploumoguer le montre, il ne suffit pas d’avoir des bâtiments pour que cela fonctionne. De fait, on constate que lorsque ces pôles ne se constituent pas à l’initiative des professionnels de santé, leurs chances de succès sont faibles. Et dans le cas  de notre commune, on ne peut que constater que le cabinet médical de la rue Saint Yves et le cabinet infirmier ont choisi de se moderniser là où ils sont déjà. Sans eux, le pôle médical est mort-né. Le seul petit espoir de le sauver serait de réussir à conclure des partenariats pour tenter de créer des services innovants de santé. Faut-il encore que la municipalité le comprenne et fasse un gros travail dans ce sens.

Les banques ont longtemps pris la place des commerces qui disparaissaient en centre ville. À Plougonvelin on nous avait fait espérer quelque chose dans ce sens. Mais avec l’économie numérique, les banques elles-aussi ont commencé à être fragilisées et elles aussi disparaissent de nos bourgs car la concurrence des sociétés financières numériques est redoutable. Il n’est donc pas bien difficile de comprendre que les banques ou assurances ne sauveront pas l’économie locale.

Le projet actuel ne permet pas d’améliorer les « anciens » problèmes économiques des bourgs (horaires, parking, modèle économique), il ne fait au mieux que moderniser les locaux à travers un jeu de déplacements des commerces existants. Il ne renforce pas le commerce de proximité et semble ignorer la menace que le commerce numérique fait peser sur tous les commerces, y compris notre supermarchés qui pourtant fonctionne encore bien aujourd’hui.

Alors tout est perdu ?

Je ne le pense vraiment pas, et je pense même le contraire mais un projet de redynamisation économique ne doit absolument pas se limiter à être un projet immobilier.

Le projet Coeur de Bourg 2.0 devra d’abord impérativement régler les « vieux » problèmes, en l’occurrence ici un accès élargi à la rue Penn ar Bed, accès issu de la place du général de Gaulle. La proposition actuelle de la municipalité essaie de le faire mais à mon sens la bonne méthode est d’utiliser l’ancienne école municipale comme « porte d’entrée » sur la future place des hirondelles au cœur du bourg.

Ensuite, il est nécessaire d’accompagner administrativement et économiquement les entreprises. Aides administratives, fiscales voire participation aux premiers loyers permettent à un commerce d’avoir le temps de s’installer et de trouver sa clientèle. De telles aides existent au niveau de la région et de la CCPI.

Il faut ensuite s’attaquer au « modèle Amazon ». La commune est un acteur incontournable en matière de visibilité numérique : jamais Amazon ne s’appropriera le nom de Plougonvelin. Or, en jouant sur l’aspect local par nature non délocalisable, nos commerces peuvent retrouver un avantage concurrentiel. Et il est nécessaire de privilégier des produits et services originaux car on trouvera toujours les produits « standard » moins chers sur internet qu’en boutique.

Les circuits courts sont également un bon moyen de retrouver de la compétitivité face aux géants du commerce numérique. Mais cela doit forcément s’organiser et les acteurs publics ont une place à (re)prendre en la matière. Notre commune a une place de marché au Trezhir, elle doit avoir sa place de marché numérique.

Reste enfin l’innovation qui est un levier important pour la renaissance de nos commerces. Cette innovation touche aussi bien à l’offre, qu’aux infrastructures ou encore aux services publics. Il y a beaucoup à dire là-dessus.

Conclusion

Nos commerces communaux vont à l’évidence mal, et ce n’est pas propre à notre commune.

Un projet comme cœur de bourg est essentiel et même vital pour notre économie locale. Si son volet économique devait échouer alors notre source principale (et peut-être unique) de commerces sera internet. Mais pour qu’il réussisse il faut repenser économiquement cœur de bourg et déployer une politique économique communale cohérente, ambitieuse et en phase avec les enjeux et les outils de l’époque.

Il faut sonner la mobilisation pour nos commerçants. Arrêtons de subir. Mettons notre façon de penser en phase avec notre époque et sa révolution économique. Finissons-en avec les idées d’un âge révolu.

Je n’ai pas envie de vivre dans une citée dortoir sous perfusion d’Amazon. J’enseigne à mes étudiants de Brest Business School ce qu’est l’économie numérique, comment on la lit et comment on s’y adapte. Je m’en voudrais que ma commune sombre économiquement parce sa politique économique n’est pas adaptée et que les problèmes n’ont été ni clairement vus, ni compris.

Philippe RIS

3 commentaires

  1. francoise sanquer

    tout à fait d’accord avec toi , je dirais cependant que les professions de santé ne sont pas des commerces et selon le code de déontologie n’en n’ont strictement pas le droit (pas de pub en particulier)et que par ailleurs si les téléconsultations, que tu sembles évoquer sont un plus dans le cadre d’un diagnostic supplémentaire, ne peuvent en aucun cas remplacer l’humain qui comme HIppocrate le disait déjà est INDISPENSABLE aux soins de qualité que nous devons espérer donner et recevoir

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