Lors de la soirée électorale à Plougonvelin, le sentiment qui ressortait était une sorte d’abattement inquiet. Habituellement un soir d’élection, il y a le camp joyeux et le camp triste. Dimanche soir personne n’exprimait sa joie et son optimisme pour l’avenir.
Il est vrai que lorsque l’on va voter « pour faire barrage », « contre », « par défaut », « pour éviter le pire », on n’a aucune chance d’avoir le sentiment de gagner.
Dans le cas présent les derniers soutiens du camp présidentiel n’avaient pas d’espoir raisonnable de gagner au niveau national.
Ceux de gauche avaient sans doute compris à la vue de la profession de foi du candidat LFI qu’il avait fait ce qu’il fallait pour ne pas gagner dans une circonscription comme l’Iroise dont l’électorat est globalement de centre-droit.
Quand à ceux de l’extrême droite, la deuxième place bien qu’inédite ne pouvait pas passer pour une victoire.
Le deuxième tour
Finalement, pour le second tour les électeurs auront à choisir entre l’extrême droite et le représentant du parti qui s’est donné beaucoup de mal depuis 7 ans pour amener cette extrême droite au pouvoir, y compris à travers une dissolution inutilement hâtive et une campagne volontairement raccourcie. La dissolution était nécessaire après la débâcle des européennes et l’impossibilité d’avoir une majorité cohérente au parlement, mais elle pouvait parfaitement attendre septembre pour donner le temps aux forces démocratiques de faire campagne.
Dimanche, nous aurons donc le choix de voter entre le parti de l’extrême droite et le parti qui a ouvert les portes du pouvoir à l’extrême droite. Est-ce un choix ?
Analyse pour l’Iroise
Le camp macroniste
Le candidat macroniste sortant va probablement remporter l’élection mais son poids politique à l’assemblée nationale déjà très faible sera insignifiant dans une nouvelle assemblée à l’extrême droite ou, si un miracle se produit, à gauche de façon relative. Pour l’avoir côtoyé politiquement pendant des années, il n’est pas connu pour la force et la constance de ses engagements. Là au moins, les citoyens n’ayant rien à attendre de lui, ils ne seront ni déçus ni trahis.
L’extrême droite
Si la candidate d’extrême droite venait à gagner, nulle doute qu’elle saurait trouver le chemin du clientélisme pour se faire accepter. Combien résisteraient alors ?
La gauche
Pour ce qui est de la gauche, je serai plus sévère encore. Avec plusieurs élus du territoire nous avons essayé de faire accepter une candidate issue du milieu politique et associatif d’Iroise. Mais une fois encore, les partis nationaux ont voulu imposer de Paris leurs arbitrages idiots et irrespectueux de la volonté des citoyens. Une fois encore, la 3ème circonscription a servi de variable d’ajustement aux calculs de leurs feuilles excel. Une fois encore, cette circonscription a été humiliée parce que les citoyens ont dû choisir de voter « contre », pour le « moins pire » et pas pour une candidature à laquelle ils adhèrent.
Une fois encore, nous avons été obligés de faire front là où il est impératif de faire flux vers une aspiration politique commune, vers un avenir commun choisi.
Quels seront les conséquences ?
Insupportable légèreté de l’être politique
Je craints fort de devoir constater que quel que soit votre deuxième vote dimanche, cela n’aura aucune conséquence. Mes chers concitoyens d’Iroise, votre vote sera insignifiant.
Insignifiant puisque que vous votiez pour l’extrême droite ou le parti qui le propulse au pouvoir, l’arbre penche du même côté ; il tombera simplement plus ou moins vite.
Insupportable abandon de ce qui est fondamental
Mais insignifiant surtout parce qu’aucun de nos problèmes à court ou moyen terme n’a été traité dans cette campagne, ce qui est une hérésie absolue !
La montée des eaux va chasser des gens de leur habitation et créer de nouveaux flux migratoires inédits. Pas un sujet.
Le changement climatique va obliger à faire évoluer notre agriculture et la pêche. Pas un sujet.
Le numérique et en particulier l’IA est en train de remplir les wagons du licenciement. Pas un sujet.
Le modèle énergétique viable n’est toujours pas trouvé. Pas un sujet.
Nos enfants n’ont aucune visibilité sur l’avenir proche. Pas un sujet.
Et à moyen terme, nous avons un gros problème démographique et faisons face à un effondrement de la natalité. Pas un sujet.
Continuer malgré tout ?
Et bien désolé, pour moi tout ceci sont des sujets. Les sujets de notre vie quotidienne. Les sujets de monsieur et madame tout le monde en pays d’Iroise.
Alors dès ce lundi je reprendrai mon travail laborieux et ingrat d’élu local pour essayer de traiter ces sujets.
Je me battrai pour anticiper les conséquences négatives du changement climatique.
Je me battrai pour faire comprendre et faire prendre en compte l’évolution numérique du monde.
Je me battrai pour une vision économique de notre territoire en phase avec la réalité d’aujourd’hui.
Je me battrai pour développer la production énergétique locale.
Je me battrai pour que nos enfants aient des perspectives d’avenir sur notre territoire.
Je sais que d’autres élus locaux comme moi reprendront eux-aussi ce travail de fourmi, ou plutôt de colibri ce qui est plus poétique.
Mais ce serait quand même bien qu’à l’avenir vous, citoyens, décidiez de faire flux avec nous pour ne plus avoir à faire front contre les moulins à vent.
à part constater que c’est un échec pour tous les gens « raisonnables » que dire d’autre ?? hélas. mais continuons à nous battre pour notre belle commune et région et pays et occident et monde …